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Les MADOULET

La trace la plus ancienne que nous connaissons du nom Madoulet remonte à 1468, pendant la Guerre de Cent Ans, à la fin du Moyen-Age.

Une petite parenthèse s'impose pour comprendre la suite.
A l'époque, la principauté de Liège était sous le pouvoir du duché de Bourgogne, pays indépendant qui disposait d'une puissance qui dépassait largement les limites de l'actuelle région bourguignonne.
Or les Liégeois et leurs voisins immédiats sont en pleine révolte contre ce pouvoir. A la suite de plusieurs coups de mains des habitants des villes alentour pour tenter de recouvrer leur indépendance, Charles VIII, le duc régnant décide de mettre fin une bonne fois pour toutes, croît-il, à ces actes de rébellion. Il ordonne le sac de la ville de Liège.
Le 3 novembre, au petit matin, ses troupes envahissent la ville et, méthodiquement, pillent, détruisent, massacrent et brûlent tout sur leur passage. Il ne doit rien rester de la ville et de ses habitants. Ceux qui parviennent à fuir sont impitoyablement pourchassés et tués. Liège va brûler pendant près d'une semaine.
Quelques uns, malgré tout, arrivent à échapper aux massacres et se cachent dans la forêt entre Rocroi et la Meuse. On est en plein hiver, la neige recouvre tout, ils n'ont emporté que ce qu'ils avaient sur le dos...
Philippe de Commynes, contemporain des ces événements, a laissé des Mémoires dans lesquelles il raconte que certains de ces réfugiés ont poussé jusqu'à Mézières pensant y trouver asile auprès de leurs compatriotes réfugiés là depuis déjà plusieurs années. Mais Mézières appartient au royaume de France qui est, momentanément, allié à la Bourgogne. Ils sont capturés et livrés au duc de Bourgogne qui s'empresse de les faire pendre en place publique. Parmi ceux-ci, un nommé Madoulet.
Qui est-il ?
Un historien spécialiste du Moyen-Age, propose de l'identifier avec Amiel ou Amilius de Velroux, l'un des élus de la ville de Liège.
De façon certaine, on sait que Amiel de Velroux faisait partie des réfugiés capturés et livrés au duc de Bourgogne. Mais nous ne savons pas aujourd'hui quel est l'argument qui permet de dire que Amiel de Velroux et Madoulet sont une seule et même personne.
Une visite à la bibliothèque universitaire de Liège nous apprendra peut-être un peu plus sur cet épisode.

Nous avons là la première apparition dans un document écrit d'un Madoulet.
Il est fort probable que les Madoulet que nous connaissons aujourd'hui descendent de lui ou de sa famille.
Mais le manque de documents entre 1468 et 1600 nous laisse, a priori, dans l'impossibilité d'en savoir plus.

C'est vers 1600 que nous commençons à pouvoir étudier les familles de la région grâce notamment aux registres de baptêmes, de mariages et de décès. Mais, en grande partie à cause des guerres fort nombreuses dans la région et des mauvaises conditions de conservation du papier, tous ces registres ne sont pas parvenus jusqu'à nous en très bon état et un certain nombre d'entre eux ont même purement et simplement disparu au cours des siècles.
Il reste donc encore un certain nombre d'interrogations, d'incertitudes et d'inconnues sur lesquels nous travaillons.
Nous allons donc nous limiter à ce que nous avons pu établir de façon certaine ou quasi certaine sur cette famille Madoulet.

L'histoire commence à l'époque du règne de Louis XIV, avec Nicolas Madoulet qui est né vers 1655 à Rocroi. Il était laboureur, c'est-à-dire qu'il était propriétaire d'un attelage de bœufs et des outils de labour qui lui permettaient d'exploiter lui-même une terre qu'il louait.
Le 16 juin 1703, Nicolas achète un ensemble de terres de 45 hectares que l'on nomme les Censes Corbinot du nom de leurs premiers exploitants. C'est la plus grosse exploitation agricole du village. (> voir la transcription des attendus d'un procès nous apprenant cet achat)
A cette époque, la France est en guerre contre l'empire austro-espagnol. Nous sommes donc en frontière avec l'ennemi qui détient le pouvoir sur les Pays-Bas espagnols (aujourd'hui, globalement, la Belgique).
Par ailleurs, une succession d'hivers très rigoureux et de printemps et étés pluvieux a plongé la France dans la misère. La famine est quasi permanente.
Entre les loups, eux-aussi affamés, qui sortent des bois pour tenter de trouver de quoi se nourrir et les populations poussées par la faim à toutes les extrémités, il ne fait pas bon s'aventurer seul sur les routes, même pour se rendre aux marchés d'Auvillers-les-Forges, de Maubert ou de Rocroi.

L'hiver 1709-1710 est particulièrement froid. Il a gelé de début janvier à fin mars sans discontinuer. Plus rien ne pousse. Les semences ont gelé sous terre. Le petit gibier, les poissons, les oiseaux sont morts de froid. La famine s'installe pour de bon.
Très nombreux furent les enfants, les vieillards et même les adultes, en principe en pleine force de l'âge, qui décédèrent avant le printemps. Ce fut le cas de deux jeunes enfants, du père et probablement aussi du mari de Pérette LEPINE.
Jeune veuve de 29 ans avec une petite fille qui a miraculeusement survécu, elle épouse Anthoine MADOULET, fils unique de Nicolas.

A la mort de Nicolas en décembre 1711, c'est Anthoine, 25 ans, marié depuis à peine plus d'un an et père d'une petite Marie Jeanne de 6 mois, qui hérite des terres.

Quelques mois plus tard, la France s'inquiète. L'héritier du roi est décédé il y a 6 mois. Son fils qui devait assurer la relève décède à son tour ainsi que sa femme et son fils aîné qui n'avait pas 5 ans. La maladie semble s'acharner sur la famille royale. Il ne reste qu'un seul héritier... c'est un orphelin de 2 ans, arrière-petit-fils de Louis XIV. Cet enfant va-t-il seulement vivre ? Et la guerre est toujours susceptible de reprendre, là, juste à côté, à quelques kilomètres seulement.
Finalement, l'enfant va vivre, il va entrer en fonction à l'âge de 5 ans, en 1715, sous le nom de Louis XV.

En 1719, une fois encore, la famine règne à Sévigny et Rocroi. Les hannetons et les chenilles ont détruit les récoltes sur pied...

Malgré tout, la famille MADOULET s'agrandit. Au cours des années, ce sont 8 enfants qui sont nés chez Anthoine. Mais 4 d'entre eux sont décédés alors qu'ils étaient enfants.
Les années passent, entre sécheresses, inondations, gels, orages de grêle, épidémies de grippe, entraînant la misère à chaque fois dans les villages qui subissent ces calamités.

En décembre 1733, Marie Jeanne, la fille aînée d'Anthoine a 22 ans et se marie avec Nicaise Sommé, jeune homme de 26 ans d'une famille de laboureurs de Sévigny-la-Forêt.
Le 7 décembre 1740, ce sont deux enfants d'Anthoine, Jean Baptiste et Marie Nicolle qui se marient respectivement avec Marie Anne et Nicolas Borgnet, frère et sœur. Ces mariages croisés sont relativement fréquents à l'époque. Ils permettent de renforcer les liens entre deux familles et d'éviter la dispersion des héritages.
A cette occasion, Anthoine partage ses terres entre ses enfants. Les Censes Corbinot originelles sont donc morcelées en 5 fermes.
Sa fille aînée Marie Jeanne va construire, avec son mari Nicaise Sommé, la Cense Nicaise qui est juste à côté de celle de son père.
Jean Baptiste Madoulet, marié avec Marie Anne Borgnet va créer la Cense Madoulet.
Marie Nicolle Madoulet et son époux Nicolas Borgnet vont créer la Cense Borgnet.
Anthoine Madoulet se réserve quant à lui la ferme d'origine que les gens continuent d'appeler Cense Corbinot ou quelque fois Cense Madoulet bien que son fils soit lui aussi propriétaire d'une Cense Madoulet.
Anthoine, dans son partage, n'oublie pas Jeanne Jacquemart, sa belle-fille, née du premier mariage de son épouse. Jeanne est l'épouse de Jean Renaut. Ils héritent eux aussi d'une terre et y construise la Cense Renaut.
Toutes ces nouvelles fermes voient enfin le jour en 1743.

Il nous reste quand même une grosse interrogation à propos du dernier des fils d'Anthoine, Jean Joseph Madoulet. Installé à Bourg-Fidèle, nous ne savons pas encore de quoi il a pu hériter...

La cense Nicaise n'a semble-t-il pas existé longtemps. Elle a dû être rassemblé à la cense occupée par Anthoine à la mort de celui-ci en 1752.
C'est le fils aîné de Marie Jeanne Madoulet et de Nicaise Sommé, Anthoine Sommé qui héritera de cette grande ferme. Marié à une demoiselle Loth, les gens vont naturellement appeler cette ferme la Cense Sommé-Loth.
Ce sera ensuite un fils d'Anthoine Sommé, Georges, qui en héritera. Marié à une demoiselle Dupont, la ferme devient Cense Sommé-Dupont.
Nous n'avons pas étudié la transmission de la ferme sur les générations suivantes, mais elle est restée pendant encore longtemps dans la famille Sommé au point que son nom actuel officiel est toujours Cense Sommé.

Nous ignorons pour l'instant ce que sont devenues les censes Borgnet et Renaut.

Quant à la cense Madoulet, elle a été transmise à Nicolas Madoulet, le seul fils vivant de Jean Baptiste. Il la transmettra à son fils aîné Pierre qui lui même la transmettra à son fils Antoine, le premier à se marier de ses deux fils. Jean Baptiste, fils d'Antoine en héritera et Paul Edouard, son fils y verra le jour.
Pourquoi l'a-t-il quittée ? Il n'y a pas encore de réponse...


Sources

Monographie de Sévigny-la-Forêt, livre XIVème / Paulin LEBAS in Au Pays des Rièzes et des Sarts, Annales d'histoire locale, 14è année, 1973, n°55, pp. 587 et suivantes
Mémoires / Philippes de Commynes. - 
Chroniques d'Adrien / Adrien d'Oudenbosh. - Liège, 1902, p.220
La Principauté de Liège : Essai de chronologie, jusqu'à son absorption par la France le 9 vendémiaire de l'an VI. - http://perso.infonie.be/liege06/

 

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© Lucile Houdinet - 2004