Merci de respecter
ce travail et la mémoire de ma mère, Colette Chopplet-Houdinet,
qui en est l'auteur. Ne vendez pas ces informations, citez vos sources si vous
utilisez ces documents. Un petit mot pour me faire connaître l'usage ou
l'utilisation que vous pourriez en avoir serait aussi le bienvenu.
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Les habitants de Lonny en 1459
Nous
sommes dans la seconde moitié du Moyen Age, celle où des chartes
de franchise ont été accordées, supprimant le servage : nulle
mention n'est faite de ces serfs qui appartenaient au seigneur et ne pouvaient
ni se déplacer, ni se marier comme ils le voulaient.
Lonny est une "ville", ce qui veut dire que les gens de Lonny sont libres.
Ce sont des "bourgeois", des habitants d'un bourg : on appelait bourg
ou ville, ce que nous appelons village, dès l'instant où le seigneur
avait donné une charte.
I - Combien sont-ils ?
Antoine de Croy dit : "les
rentes et bourgeoisies d'illecques, dues aux jours de Noël et de Saint-Jean,
donc chacun bourgeois doit à chacun desdits jours, 6 deniers parisis ;
et au jour Saint-Martin d'Hiver, chacun deux poules et deux deniers d'estellage
(1), lesquelles choses peuvent valoir, par
an, à crois et à décrois, 60 sols parisis et 60 paires de
poules".
Chaque bourgeois doit donc,
par an, 12 deniers de bourgeoisie, deux deniers et deux poules de droit d'étalage
(2).
La poule valant 6 deniers (prix attesté par ce même document, à
propos de Renwez, Cliron, Wartigny), chaque bourgeois doit l'équivalent
de 26 deniers.
Antoine de Croy dit que ces rentes rapportent 60 sols (720 deniers) et 120 poules
(soit l'équivalent de 720 deniers), au total donc 1440 deniers. A raison
de 26 deniers par bourgeois, nous arrivont au chiffre de 55 bourgeois.
Il faut entendre par là 55 familes soit envion 250 à 300 personnes.
II - Quelles sont leurs professions ?
Il
est impossible de le savoir d'une façon certaine : dans ce document, Antoine
de Croy ne cite que le curé.
On devine cependant, à travers le
texte, un meunier et ses aides, un fermier à la Bouverie, un autre à
la ferme Marigny, un autre encore à la Grange Prouzet, avec leurs ouvriers
agricoles et leurs vachers...
Il doit y avoir aussi un charron : le seigneur
de Lonny est autorisé à avoir un "franc charlier", c'est-à-dire
un charron qui ne paie pas d'impôts.
Sans doute faut-il voir là un moyen d'attirer un volontaire pour cette
profession : les charrons se procuraient habituellement le bois nécessaire
à l'exercice de leur professions, dans les bois du seigneur, moyennant
une redevance appelée le servage ; le charron de Lonny, qui en est exempt,
est donc un privilégié.
On peut enfin ajouter la domestivité
du château : palefreniers, femmes de chambres, cuisiniers.
Pour le reste, des petits paysans qui vivent
de leur terre, avec un élevage de poules, lapions, oies, canards, peut-être
un cochon ; les fruits et légumes du jardin : la vie n'a guère changée
dans les campagnes...
Mangeant
sainement peu de viande, le paysan qui ne possède pas le droit de chasser,
réservé au seigneur, peut cependant s'offrir du sanglier : le paysan
possède en effet le droit de détruire les nuisibles dans la forêt,
et le sanglier, capable des pires ravages dans les champs, est classé comme
nuisible.
Tous ces bourgeois payent le droit d'estellage à la Saint-martin d'hiver,
c'est-à-dire qu'ils ont le droit d'étaler leurs marchandises sur
la place ou de tenir boutique.
On peut donc supposer qu'ils sont des artisans vendant des objets de leur fabrication,
ou des commerçants profitant de la proximité de la grande route
des Flandres.
De nombreux textes attestent que les marchandises
des Flandres descendent à Mézières, puis, de là, vont
aux grandes foires de Champagne ou de Dijon.
Lonny, proche de la plaque tournante qu'est Mézières, pouvait avoir
un commerce actif.
Et on peut imaginer que les paysans de Lonny vendaient leurs surplus : ufs,
beurre, légumes, fruits, grains...
Et nul doute que ces bourgeois de Lonny
doivent obéir à l'ordre qu'Antoine de Croy rappelle dans son dénombrement
: que viennent devant les prévôts et échevins de Château-Porcien
"une fois l'an et à jour nommé toutes les justices des villes,
villages, ou chefs de censes et maisons de toute la prévôté,
ajuster leurs balances, poids, aulnes, pots, pintes, quartels et toutes les mesures
quelconques sous peine d'amende".
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Notes :
(1) estellage ou étalage : droit pour
chaque bourgeois d'étaler ses marchandises sur la place.
(2) En moyenne, si chacun paye la même
somme.