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Un village
en guerre (1870)
Merci de respecter
ce travail et la mémoire de ma mère, Colette Chopplet-Houdinet,
qui en est l'auteur. Ne vendez pas ces informations, citez vos sources si vous
utilisez ces documents. Un petit mot pour me faire connaître l'usage ou
l'utilisation que vous pourriez en avoir serait aussi le bienvenu.
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La défaite (16
août - 27 septembre)
16 août 1870
Gravelotte. Une rencontre furieuse, terriblement meurtrière. Les armées
françaises, échec après échec, se regroupent vers
Metz. Mais les nouvelles ne filtrent guère... (1)
Lonny, comme tous les villages situés le long d'une voie ferrée,
reçoit l'ordre d'installer une ambulance : une ou deux salles d'infirmerie,
auxquelles les habitants fournissent lits, matelas, draps, couvertures, tables
et vaisselle. La commune, quant à elle, dépense 100 francs pour
le matériel. Le curé du pays, Isidore VUIAT, 38 ans, servira d'aumônier,
tandis que Joseph BOURGEOIS, fera office d'infirmier.
18 août 1870
On voit arriver les premiers blessés, ceux de la bataille de Reichsoffen
; et on apprend enfin la vérité sur les combats : héroïsme
mais boucherie !
22 août 1870
Après la stupeur et la consternation, c'est l'affolement... Une affiche
annonce en effet que l'ouverture de la chasse, prévue pour le 28, est ajournée,
car la guerre approche. Et, très vite, elle arrive dans les Ardennes, à
la poursuite des armées françaises en déroute et repliées
à la hâte sur Sedan...
Auguste LEMOINE, un conseiller municipal, capitaine de la Garde Nationale mobile,
rejoint l'armée du Nord.
Mercredi 31 août 1870
On entend nettement de terribles canonnades, comme un roulement ininterrompu de
tonnerre.
Jeudi 1er septembre 1870
Vers le soir, on voit passer un régiment de chasseurs français.
En déroute à Illy, ils se sont échappés à travers
bois, ont rejoint Mézières et maintenant gagnent Rocroi. Nouvelles
bien alarmantes : l'armée serait encerclée.
Vendredi 2 septembre 1870
Le canon gronde à nouveau, et plus près semble-t-il...
Samedi 3 septembre 1870
Il pleut. Le journal habituel, le Courrier des Ardennes, ne paraît pas.
Grands Dieux ! Que se passe-t-il ? Et toujours ce canon
Lundi 5 septembre 1870
Il paraît que Sedan a capitulé ! Que les Prussiens marchent sur Mézières
!
Mardi 6 septembre 1870
Enfin le journal ! que l'on s'arrache
Un journal qui titre "C'est sous
le coup de la plus profonde douleur que nous publions les nouvelles qui suivent.
Pauvre France ! Pauvre Patrie !" Sedan est tombé ! Et pire, l'Empereur
Napoléon III a capitulé au château de Bellevue. On lit avidement
les récits des témoins.
Du côté de Bouillon, l'un a vu, le 3 septembre, "un sauve-qui-peut
général de familles françaises venues des environs de Sedan".
D'autres ont rencontré des Prussiens : "Ils demandent peu de renseignements
sur la direction des routes. Ils paraissent connaître les chemins aussi
bien que les gens du pays ! Plusieurs étaient munis de cartes géographiques
! Les cavaliers s'éloignaient par petites bandes en longeant autant que
possible la frontière : l'infanterie gardait la route".
"Nous sommes victorieux, dit un officier. Les Français sont cernés
en grande partie dans Sedan. Le reste est refoulé vers Mézières".
Certains évoquent la bataille de Sedan : "Le carnage a été
affreux. Les Français se sont défendus avec un courage surhumain.
Mais le désastre est complet. L'armée française est en complète
déroute..."
Sous les pluies diluviennes et froides, 14 000 blessés sont lentement évacués
par le chemin de fer, vers la Belgique et le Nord. Ils apportent avec eux le sentiment
d'une trahison incompréhensible, l'horreur qu'ils ont vécue, un
immense désespoir...
L'ambulance du village ne désemplit pas pendant une dizaine de jours. Vers
le 14, on ne descend plus du train que les malheureux "qui, à raison
de la gravité de leurs blessures, ne pourraient supporter un plus long
voyage"...
Peu à peu, Lonny apprend les terribles détails : la Dernière
Cartouche de Bazeilles, les Braves Gens de Floing, le martyr de Sedan, les incendies,
les massacres...
Après cela, les Prussiens ont marché sur Paris : des convois fort
tranquilles ont sillonné toutes les routes, mêlés à
des troupes qui ont mis l'arme à la bretelle, et précédés
de cette cavalerie légère, si rapide et si cruelle, les magnifiques
Uhlans, qui feront bientôt régner la terreur !
Ils ont avancer sans rencontrer la moindre résistance : Napoléon
III est prisonnier et, avec lui, un Maréchal de France, 39 généraux,
82 000 soldats valides ! Le reste de l'armée est encerclée à
Metz. Par on ne sait quel miracle, 35 000 hommes ont pu y échapper. C'est
là tout ce qui reste à la France, qui n'a plus d'armes, plus d'uniformes,
plus de cartes...
27 septembre 1870
Au petit matin, est mort à l'ambulance un de ces jeunes soldats blessés
à Sedan, Firmin CHABERT, 21 ans, originaire de l'Ardèche. Il est
inhumé au cimetière de Lonny.
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(1) Le fils aîné de Monsieur
MARION, architecte à Mézières et ancien propriétaire
du Petit-Château de Lonny, s'y fait tuer. Le père reçoit là
un coup dont il ne se remettra pas et qui le conduira à la mort six mois
plus tard.
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