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Un village en guerre (1870)

Merci de respecter ce travail et la mémoire de ma mère, Colette Chopplet-Houdinet, qui en est l'auteur. Ne vendez pas ces informations, citez vos sources si vous utilisez ces documents. Un petit mot pour me faire connaître l'usage ou l'utilisation que vous pourriez en avoir serait aussi le bienvenu.

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L'occupation pacifique

8 juillet 1871 : une dépêche télégraphique tombe :
"Circulaire de Mézières.
Préfet à Sous-Préfet et Maires des stations télégraphiques moins Vireux, Fumay et Givet.
Le Commissaire civil allemand, en vertu des pouvoirs qu'il tient de l'état de siège, interdit jusq'à nouvel ordre, le colportage du Moniteur Universel dans le département, pour attaques contre la nation allemande.
Empêcher la circulation de ce journal pour éviter contre les vendeurs ou colporteurs de mesures trop rigoureuses.
Signé : TIRMAN"

12 juillet 1871 : encore une dépêche :
"Circulaire Préfet à Maires des stations télégraphiques moins Fumay, Vireux et Givet.
L'autorité allemande m'informe que l'interdiction réclamée par elle du Moniteur Universel ne devra s'appliquer qu'au Petit Moniteur Universel. Faites-leur l'interdiction en ce qui concerne le premier de ces journaux.
Signé : TIRMAN"

Encore une autre dépêche, sans date celle-ci :
"Circulaire de Mézières n° 429, 11h25 du matin, Préfet à Maires des stations télégraphiques.
La discussion générale sur la proposition Rivet a été close hier et l'assemblée a adopté à la majorité de 433 voix contre 227 le premier considérant du projet de la commission, celui qui est relatif au pouvoir constituant. La discussion doit continuer aujourd'hui à (??)

Et enfin, celle-ci :
"Circulaire de Mézières n° 430, 11 heures 26 du matin. Préfet à Maires des communes desservies par des stations télégraphiques.
L'autorité allemande ne s'oppose plus au colportage du Petit Moniteur Universel.
Pour copie conforme, le chef de station
Joseph GODARD"

8 août 1871 : une commission municipale est "chargée de désigner les habitants pouvant loger convenablement les officiers, mariés ou non, de l'armée allemande qui opteront pour le logement en nature chez l'habitant."
Et une liste est établie : RICARD père et fils, Constant DETRAU, HANNEQUIN, NISOLE-TROYON, BILLAUDEL-NISOLE, VAULET, ROUSSEAU D'HIRAUMONT, HORBETTE, le maire, DUMOUCHEL, JOSEPH, HUBERT, BOCHET, WIART, DUCHESNE, Mme SAINGERY-MOZET, Mme SAINGERY-RENARD et Mme BOCHET.

16 décembre 1871 : une souscription nationale est ouverte : "Un sou pour reconstruire les chaumières".
Madame THIERS, la femme du chef du pouvoir exécutif, lance un appel en sa faveur :
"La guerre a détruit des milliers de chaumière, depuis la frontière de l'Alsace jusqu'à l'océan. C'est par le concours de tous les Français qu'il faut réparer les désastres supportés au nom de la Patrie.
La plus légère offrande, multipliée par des milliers de souscripteurs, produira des sommes considérables...
Les plus pauvres citoyens seront joyeux d'offrir leur secours aux victimes de la guerre que l'hiver surprend sans abri; Les vieillards, les femmes, les petits enfants apporteront chaque semaine l'obole qui servira à relever les toits ruinés par le canon ou brûlés par l'ennemi. Les sommes réunies seront réparties entre les départements envahis et la banlieue de Paris.
On rebâtira d'abord les chaumières, fermes, maisons, dont la valeur était inférieure à 500 francs et dont les propriétaires seront déclarés sans ressources par le Conseil municipal de leur commune."

Le Préfet, de son côté, encourage les maires, dans sa circulaire du 16 décembre :
"La souscription est fixée à un sou par semaine et par personne. Réduite à ces proportions, elle est accessible aux plus pauvres. Qu'est-ce qu'un sou sur le produit du travail d'une semaine ?
Si petite pourtant qu'elle soit, cette cotisation généralisée sera d'une grande puissance : un sou par personne et par semaine (si tous souscrivaient dans les Ardennes) donnerait 75000 francs par mois. C'est le moyen de reconstruire au moins 40 maison d'ouvriers nécessiteux !
Nulle part plus qu'ici, cette idée féconde ne mérite d'être encouragée, car nulle part la guerre n'a amoncelé plus de ruines. Nulle part non plus, on ne profitera, dans une plus large mesure, de la cotisation des pays épargnés par la guère.
A l'œuvre donc, Messieurs. Formez tous dans vos communes un comité pour recueillir et surtout solliciter les dons. Personne n'irait vous porter un sou, n'hésitez pas à l'aller chercher !
Personne ne le refusera pour un tel but.
Si pauvre soit-il, chaque chef de famille tiendra certainement à l'honneur de souscrire un sou sur la tête de chacun des siens."

Un bilan, établi par circulaire préfectorale du 18 mars 1872 dira :
"Notre département occupe la 5ème place parmi ceux qui ont été les plus éprouvés par la guerre : 14 communes ont été victimes d'incendies plus ou moins considérables, l'une d'elles a perdu environs 400 maisons, une autre près de 200..."

1er février 1872 : Mr. TIRMAN, le Préfet, déconseille les festivités du Carnaval :
"Les douloureuses épreuves que nous traversons, le deuil du pays, la présence des troupes allemandes chez nous, tout nous fait un devoir de nous abstenir de manifestations joyeuses et de plaisirs bruyants. Il est à peine besoin d'insister sur la nécessité de conserver, dans les circonstances actuelles, une attitude pleine de réserve et de dignité.
En beaucoup de lieux d'ailleurs, les travestissements ordinaires à cette époque pourraient être le prétexte de désordres graves auxquels le masque assurerait l'impunité. Le moindre conflit qui se produirait alors ne manquerait pas d'amener des complications sérieuses et d'exposer les populations honnêtes et sensées à des répressions collectives que l'état de siège rend possibles. J'approuve donc les mesures que vous croirez devoir prendre pour empêcher, dans votre commune, des démonstrations tout à fait intempestives."

Aussitôt, le maire de Lonny prend un arrêté :
"Les travestissements, bals, divertissements, démonstrations et réjouissances publiques sont formellement interdits dans la commune de Lonny, pendant le Carnaval de l'année 1872."

Certes, on était en paix, mais la vie ne reprenait pas son cours normal : la vue des soldats allemands était une oppression…

2 février 1872 : le Conseil municipal nomme une commission chargée de recueillir les souscriptions volontaires destinées au paiement d'une partie de la dette de la France envers l'Allemagne. Ce "comité de souscription pour la libération de la France" est composé de MM. HANNEQUIN, RICARD et JOSEPH.

11 février 1872 : il est décidé que l'indemnité de logement des troupes qu'on recevra des Allemands sera utilisée pour s'offrir une horloge publique. La population signe et donne son accord.

11 août 1872 : le maire et le journal donnent quelques explications sur ces indemnités :
le logement fourni aux troupes allemandes en marche (c'est-à-dire restant moins de 4 nuits) ne donne droit à aucune indemnité. En dédommagement, le fumier reste propriété de l'habitant… il faut dire que les chevaux sont nombreux dans les régiments !
Si les soldats restent plus de 4nuits, on applique le barème suivant :
1 nuit d'homme = 40 centimes
1 nuit de cheval = 15 centimes
1 homme nourri pendant une journée = 1 franc
1 cheval nourri pendant une journée = 2 francs
Et les habitants de Lonny, pour avoir logé des sous-officiers et soldats du 3 mars au 31 octobre 1871, reçoivent 1439, 30 francs qui serviront donc à acheter une horloge pour l'église.
Pas toute la somme, à la vérité, parce que 4 familles n'ont finalement pas abandonné leur indemnité. Et la commune, qui a touché globalement l'argent, redistribue :
12,80 francs à Mr. BADRE (qui a logé 2 hommes pendant 16 jours)
12,80 francs à Mr. HUART-AUBART (qui a logé 2 hommes pendant 16 jours)
6,40 francs à Mr. GEOLTRAIN (qui a logé 1 homme pendant 16 jours)
8,40 francs à Mr. ROUSSEAU D'HIRAUMONT (qui a logé et chauffé 1 officier pendant 7 jours)

20 février 1873 : avec l'espoir que ces indemnités de logement ne seront pas les seules, le Conseil général réclame des dommages de guerre pour les Ardennes.

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